Issue d'une famille bourgeoise et petite nièce de Fragonard, Berthe Morisot (1841-1895) fut l'élève de Camille Corot de 1862 à 1868. Avec lui, elle apprit le plein-air et la peinture sur le motif et n'oublia jamais sa leçon. L'autre rencontre décisive fut celle de Manet en 1868 dont elle devint l'élève et le modèle (le Balcon, 1868, Paris, musée d'Orsay), elle épousa son frère Eugène Manet en 1874.
Portrait de Berthe Morisot
Par Edouard Manet - 1872
De 1864 à 1873, elle exposa régulièrement aux Salons. Puis, de 1874 à 1886, elle fut de presque toutes les expositions impressionnistes.
La lecture - 1869 Le berceau - 1872
En 1876, Zola notait ainsi que "Melle Berthe Morisot a de petits tableaux dont les notes sont d'une vérité exquise. Surtout deux ou trois marines d'une grande finesse et des paysages, de femmes et d'enfants se promenant dans les hautes herbes". Le goût des marines lui était venu l'année précédente, lors d'un séjour dans l'île de Wight. Sa palette s'éclaircit alors : elle travaille les verts, les bleus, les roses et les blancs transparents.
La chasse aux papillons -1874
Eugène Manet à l'île de Wight - 1875
Marine en Angleterre - 1875
En 1879, Berthe Morisot ne participa pas à la 4ème exposition impressionniste car elle venait de donner naissance à sa fille Julie. S'étant remise au travail à Bougival, où son mari Eugène Manet avait loué une maison, Berthe Morisot ne se lassait plus de prendre sa fille pour modèle.
Au bord du lac -1883
Eugène Manet et sa fille au jardin de Bougival-1883
Dans la villa construite au 14 rue de Villejust à Paris, le couple recevait des peintres comme Degas, Renoir, Monet, Caillebotte...mais aussi des collectionneurs, notamment Rouart et des poètes tels tels que Mallarmé ou Valéry. Mais cette activité mondaine fut sans conséquence directe sur son oeuvre. Ses portraits demeurèrent réservés à un cercle étroit de la famille ou à l'anonymat.
Jeune femme en toilette de bal- 1879 Julie au violon - 1893
Jeune fille au chat - 1892 Jeune fille à l'éventail - 1893
En 1883, le décès de son beau-frère Edouard Manet puis celle de son époux, Eugène en 1892, l'enferma davantage dans cette réserve qui était naturelle chez elle. Le succès de l'exposition organisée par Geoffroy chez Boussod et Valadon, boulevard Montmartre, n'y changea rien. Elle commença à avoir des problèmes de santé qui ne l'empêchèrent toutefois pas de voyager encore beaucoup durant l'année 1894, peut être même de trop car elle s'éteignit le 2 mars 1895, à peine âgée de 54 ans !
En apprenant la nouvelle, Auguste Renoir alla s'enfermer pour pleurer. Cette disparition, après celle d'Edouard Manet lui fut difficile à supporter.
L'année suivante, en 1896, Durand-Ruel organisa une vaste rétrospective, comprenant 300 oeuvres présentées par Mallarmé : le "prince des poètes" lui vouait depuis toujours un véritable culte.
Paul Valéry, qui fut son neveu par alliance, écrivait d'elle dans la préface du catalogue de l'exposition chez Druet en 1926 "qu'elle était simple, pure, intimement et passionnément travailleuse, plutôt renfermée mais renfermée avec élégance".
Elle-même, sincèrement modeste relativisait les ambitions du peintre : "Fixer quelque chose de ce qui se passe, quelque chose, la moindre des choses, un sourire, une fleur, un fruit, une branche d'arbre..."
Si beaucoup jugèrent son travail avec une bienveillance un peu condescendante, quelques uns comprirent son talent !